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Il est des histoires de guides, comme des histoires extraordinaires et celle qui me lie à Jacques fait partie de celles-ci : dans les années 70, j'avais comme très jeune guide le mandat du service des sports à disposition des étudiants de l'université de Lausanne, la responsabilité d'organiser les activités en montagne, soit du ski de rando et de l'alpinisme. Et c'est à cette époque-là que j'ai fait la connaissance de l'étudiant en droit qu'était Jacques qui ensuite a encore compléter ses études en HEC. Il a fait de ces outils une magnifique carrière à travers le monde mais sa passion pour la montagne n'a jamais cessé, où que sa carrière l'aie emmené, en Chine, au Liban ou en Syrie. Puis, l'âge de la retraite aidant, Jacques s'est stabilisé dans la région lausannoise et ne travaille "plus" qu'à 70% ... Quand il m'a appelé pour faire quelque chose ensemble, quarante ans après notre dernière sortie sans que nous ne nous soyons jamais revu ou entendu, je n'ai eu aucune peine à le remettre et c'est comme si je l'avais quitté la veille ... Plusieurs rencontres durant lesquelles il m'a présenté ses amis alpinistes et nous sommes tombé d'accord pour partir en Afrique et y faire l'ascension du Kilimandjaro. C'est finalement avec son pote Daniel que nous sommes partis ce début octobre. De magnifiques retrouvailles sur une montagne exceptionnelle !
Dernier entraînement et derniers petits réglages avant le départ au Kilimandjaro avec mes futurs compagnons Jacques, Eric, et plus tard Daniel qui nous rejoindra. Edouard et son fils Pierre se joignent aussi à nous, mais eux c'est le Népal qui les attends ... Et c'est avec une magnifique ascension du Breithorn sous ambiance automnale que nous achevons notre préparation. Tous sont au top, je n'ai aucun doute pour la suite de notre programme ! Une météo, une vue exceptionnelle, c'est vraiment cadeau que de pouvoir faire des 4000 m à la fin septembre ! Encore l'arête du Hohlaub de l'Allalin, ainsi ma saison dans les Alpes s'achève en beauté : d'autres continents et d'autres montagnes m'attendent cet automne.
L'objectif était ambitieux, j'en conviens : pour enchaîner les ascensions de trois sommets de 6000 mètres en trois semaines , il faut beaucoup de chance. Elle nous a souri pour les deux premiers, mais c'était déjà "à l'arrache" ! Car si pour les 6127 m du Stock Kangry tout s'est bien passé avec une météo de rêve, pour le Kang Yatzé II et ses 6245 m, elle a été très perturbée. Beaucoup de neige fraîche, visibilité quasi nulle et vent ont perturbé la fête. Autant dire que traverser sur le Kang Yatzé I (6401 m) par la longue arête qui les sépare était mission impossible. Et après ce deuxième succés, nous avons rejoint le camp de base et ses trente cm de neige fraîche. La ténacité d'une équipe super motivée a encore permis un essai sur la voie normale du Kang I qui s'est arrêtée à 5800 m, à la hauteur des premières cordes fixes avant notre retour sur Leh et ses facilités ... Mais quelle belle aventure ! Une équipe de rêve, bien préparée, bien acclimatée, bien soudée, une bonne partie du groupe venant de la région genevoise mais aussi du plus beau canton suisse avec deux zozés pur jus. L'alchimie a bien fonctionné et nous nous retrouverons j'en suis sûr ! Peut être sous le soleil des Seychelles ... ou de Cuba, là où le rhum coule à flot ...
C'est ma cinquième visite du massif du Mont Rose en ce mois d'août et je termine donc ma saison d'alpinisme dans les Alpes avec mon fidèle ami Denis. Sa femme Catherine nous l'a rappelé, cela fait 31 ans que pratiquement chaque année nous faisons une sortie en montagne ensemble. C'est une belle histoire de guide qui a commencé en 1987 avec un engagement pour l'ascension du Mt Blanc de Cheillon, j'ai remplacé un collègue. Incrédule, Catherine en attendant mon arrivée constate que mon nom n'apparaît pas sur la liste des guides affichée à la cabane des Dix. Jusqu'à ce que je puisse lui faire comprendre que la liste des guides en Suisse ne se résume pas à celle qu'édite le Valais pour les siens ! Ma belle médaille de l'UIAGM l'a rassurée et notre collaboration perdure depuis lors. Nous sommes devenus amis et j'ai le privilège d'être le parrain de Thib, leur fils cadet. Cette année, notre camp de base s'est établi à Gnifetti et nous avons pu épingler les 4000 du coin avec une jolie férocité ... Pour moi, l'aventure continue cet automne d'abord au Ladakh, ensuite au Kilimandjaro et enfin au Bhoutan. Bye bye les Alpes ...
C'est à deux reprises que j'ai eu l'occasion cette mi-août d'emmener des petits groupes à la cabane du Mt Rose. Pas facile cette montée avec le Grenzgletscher qui diminue de plus en plus laissant derrière lui un chaos de blocs instables mélangés à la glace fondante. Cette montée en cabane, célèbre pour sa conception et son architecture révolutionnaire est bien "vendue" par l'office du tourisme local, il n'empêche qu'elle demande de la prudence, et au minimum de savoir marcher avec des crampons. C'est toujours questionnant de voir le long du chemin au départ de Rotenboden le nombre de touristes naïfs, mal équipés allèchés par le panneau qui annonce 3h20 pour atteindre le fameux refuge. Heureusement, la plupart remontent sagement lorsqu'ils voient les premières crevasses ... Mes groupes ? De 10 ans à 73 ans ! D'abord une famille, Stéphanie, Sylvain et leurs enfants Yoann et Alena, ensuite quelques personnes connues en ski de rando comme Andrée, Jean Claude et Marie Noëlle avec deux cinquas super copains, Jacques et Jean Pierre. On a eu de la chance, parce que le must de cette montée c'est la vue extraordinaire sur les plus hauts sommets des Alpes suisses. Et on a bien été servis, un véritable feu d'artifices de 4000 mètres avec des ambiances et des lumières juste fantastiques.